Association Prix Martine Anstett - Prix 2016

Prix 2016 Association Prix Martine Anstett
Vidéo de la cérémonie du 29 avril 2016

En cas de problème avec la vidéo, voici le lien YouTube

Un an jour pour jour après la disparition de Martine Anstett, le prix pour les Droits humains qui porte son nom vient d'être décerné, ce 29 avril 2016, au Péruvien César Estrada. Il est le premier lauréat de cette récompense.

César Estrada ChuquilinCésar Estrada Chuquilin (Pérou) est porte-parole communautaire indigène et membre du Red de Comunicadores Indigenas del Perú – REDCIP (réseau de communicants indigènes du Pérou). Depuis l’âge de 14 ans, il est « rondero » et veille à protéger les intérêts de sa communauté indigène à l’égard des tiers (fonction reconnue par la Constitution péruvienne qui prévoit une certaine autonomie et des fonctions quasi-juridictionnelles à certains représentants de communauté).

Il a dénoncé plusieurs exactions concernant des conflits fonciers dans la région, notamment l'affaire de la famille Chaupe, les problèmes environnementaux liés au projet minier Conga, dans la région de Cajamarca. Le mégaprojet minier Conga est mis en œuvre par le consortium Yanacocha, qui est composé d’une entreprise des États-Unis (Newmont), d’une entreprise péruvienne (Buenaventura) et de la Banque mondiale. Aucune des communautés touchées par le projet n’a été consultée et pour imposer le projet, l’État a déclaré l’état d’urgence et a poursuivi les membres des communautés qui s’y sont opposés. L’État a autorisé l’usage de la force pour réprimer le mouvement de contestation du projet, un choix qui a coûté la vie de cinq personnes.

César Estrada Chuquilin a également dénoncé toutes les menaces reçues par les membres des communautés paysannes qui se sont opposés au projet minier. Par le biais de moyens audiovisuels et des réseaux sociaux, il a participé à la diffusion d’informations ayant permis d’attirer l’attention des organisations nationales et internationales des droits de l’Homme.

Depuis 2011, il fait régulièrement l’objet de menaces de mort, d’actes d’intimidations et d’agressions tout comme sa famille, en particulier son père et sa femme. César Estrada Chuquilin est aussi victime d'un acharnement judiciaire. Il est accusé de vol et d'irrégularités financières, ainsi que d'avoir enlevé une femme d'affaires de Yanacocha. En 2014, la Commission interaméricaine des droits de l'Homme (CIDH) a édicté des mesures provisoires visant à le protéger.

En septembre et octobre 2015, le défenseur a été victime de tentatives d'assassinat. Il a été attaqué en septembre alors qu'il revenait de Celedin après une visite d'inspection avec les gardiens de la lagune, aux lacs Conga, où ils ont évalué l'impact environnemental du projet minier dans la région. Les gardiens de la lagune sont également victimes de harcèlement judiciaire à cause de leur opposition au projet minier Conga. Depuis l’attaque de 2015, César Estrada Chuquilin souffre de problèmes de santé. Encore récemment, il y a quelques jours, il a reçu des menaces alors que devait s’ouvrir son procès.

Fin

Compte-rendu de la réunion de présélection des candidatures du Prix des droits de l’Homme Martine Anstett (12 janvier 2016)

Le comité de présélection composé de Frantz Vaillant (Président), Louis Joinet (Vice-président) et Delphine Couveinhes Matsumoto (Secrétaire générale) s’est réuni le 12 janvier afin de faire une présélection de cinq candidats. Cette liste de cinq candidats sera ensuite transmise au comité pour la sélection finale en février prochain.

Plusieurs critères ont présidé au choix des cinq profils retenus : une représentation géographique, une action reconnue dans le domaine des droits de l’Homme, des circonstances particulières (situation politique, emprisonnement, etc.), une thématique à encourager.

Le comité après avoir échangé sur les différents profils a retenu les 5 personnes suivantes :

César Estrada – Pérou (proposé par Michel Forst)

Il est journaliste et membre du Red de Comunicadores Indigenas del Perú – REDCIP (réseau de communicants indigènes du Pérou). Il a dénoncé plusieurs exactions concernant des conflits fonciers dans la région, notamment l'affaire de la famille Chaupe, et les problèmes environnementaux liés au projet minier Conga, dans la région de Cajamarca. En septembre 2015, le défenseur a été victime d'une tentative d'assassinat, et il a déjà été victime de persécutions graves et d'intimidation, de diffamation, harcèlement, menaces, attaques et vols à cause de son travail légitime et pacifique en faveur des droits humains. Il est aussi victime d'un acharnement judiciaire permanent, il est notamment injustement accusé de vol et d'irrégularités financières et d'avoir enlevé une femme d'affaire de Yanacocha. L’ONG Front Line Defenders est profondément préoccupée par l'intégrité physique et psychologique et la sécurité de Cesar Estrada et pense que les menaces de mort contre le défenseur des droits humains ont un lien direct avec son travail légitime, en particulier lorsqu'il dénonce les exactions perpétrées par le projet minier Conga et Yanacocha à Cajamarca au Pérou. Le prix pourra l’aider à être protégé et à saluer son action dans un domaine où les défenseurs en Amérique latine sont régulièrement menacés.

Juan Carlos Trujillo Herrera – Mexique (proposé par FIDH)

Il a monté un réseau de familles de disparus « Familiares en Busqueda Maria Herrera » suite à la disparition de 4 de ses frères en 2008 et 2010. Il a créé cette association afin d’apporter son soutien aux familles de disparus (qui les aide par exemple à constituer leur dossier juridique ou à mener des recherches). Elle a organisé des caravanes nationales pour faire connaître le problème des disparitions forcées permettant ainsi son inscription dans l’agenda politique. Son organisation fonctionne avec peu de moyens mais son action est reconnue. Ce prix pourra contribuer à donner une visibilité au travail de l’association dans un domaine d’importance au Mexique où les disparitions forcées sont courantes.

Djeralar Miankeol – Tchad (proposé par FIDH)

Condamné à deux ans de prison ferme pour « outrage à magistrat », la Cour d’appel de Moundou a prononcé la relaxe inconditionnelle de Djeralar Miankeol le 28 juillet 2015. L’Observatoire se félicite de l’acquittement du défenseur des droits à la terre et responsable de l’association Ngaoubourandi, organisation qui s’oppose à l’accaparement de terres et travaille sur les questions relatives à la production pétrolière.

Nora Bowier – Libéria (proposée par Frantz Vaillant)

Elle est la coordinatrice des programmes à l'Institut de développement durable de Duarzon, au Libéria et supervise actuellement la mise en œuvre de trois programmes portant sur la protection des terres communautaires, les droits des communautés et la direction des entreprises, et la gouvernance des forêts. Elle considère que la participation des communautés aux processus de prise de décision est essentielle. En 2013 et 2014, Nora a organisé et encadré neuf consultations avec les communautés rurales au sujet du projet de loi sur les droits fonciers. Elle a travaillé en étroite collaboration avec des militants pour le droit à la terre et avec des défenseurs des droits de l'Homme dans le but d'informer plus de 580 participants au sujet du projet de loi en question. Elle a par ailleurs recueilli les opinions au sein de la communauté et a rassemblé les contre-propositions élaborées en vue de protéger les dispositions de la loi en faveur de la communauté . Nora Bowier est une femme très engagée qui milite dans le domaine des droits des femmes et la protection de l’environnement.

Pacifique Nininahazwe – Burundi (proposé par FIDH)

Juriste de formation, il est Président du FOCODE depuis sa création en 2001. Pacifique NININAHAZWE est né le 18 juin 1976 à IJENE (dans la Province de NGOZI de l’époque) avant que ses parents s’établissent définitivement à MAKAMBA. Très sensible à la question de la réconciliation nationale, il a créé avec un certain nombre de ses camarades de classe au Lycée de RUTANA, l’Organisation pour la Renaissance et la Conscience (ORECO) en 1996 afin de s’attaquer au climat de violence et de méfiance ethniques qui menaçait la tranquillité du Lycée. Arrivé à l’Université du Burundi en 1998, moins de trois années après des violences qui avaient ensanglanté le Campus universitaire de MUTANGA, Pacifique NININAHAZWE se joint à ses 26 autres camarades provenant de différentes régions et composantes ethniques du pays, pour constituer le Forum pour la Conscience et le Développement (FOCODE). Il en a été élu comme premier Président dès 2001. Il est Secrétaire Général de l’Action Chrétienne contre le SIDA et la Pauvreté (ACSP) ; membre fondateur du Burundi Green Movement (BGM) et de l’Organisation pour la Gouvernance et la Transparence (OTRAG) ; membre du comité de suivi des consultations nationales sur les mécanismes de justice de transition (comité élu et renouvelé par les délégués de différentes organisations de la société civile burundaise en juillet 2008 . La récompense d’un acteur de la société civile au Burundi pourrait être encourageante dans un climat extrêmement tendu.

Les dossiers documentés sur les cinq candidats seront transmis au comité de sélection quelques jours avant la réunion du jury.
Pour consulter le compte-rendu complet de la réunion de présélection des candidatures du Prix des droits de l’Homme Martine Anstett (12 janvier 2016), c'est ici.